Bertrand Dicale - Ni noires ni blanches - Soubresaut

Ni noires ni blanches de BERTRAND DICALE & Bondeko de TOTO BONA LOKUA


Ni noires ni blanches est l’Histoire des musiques créoles écrite par Bertrand Dicale et publiée par les éditions de la Cité de la musique sous le label La Rue musicale.  On a lu l’essai avec grand intérêt. On a fait le lien avec le nouvel album du trio Toto Bona Lokua.


Bertrand Dicale - Ni noires ni blanches - SoubresautBertrand Dicale est un nom connu dans le domaine des livres sur la musique. On avait lu avec avidité sa biographie-essai de Serge Gainsbourg dans laquelle on apprenait avec surprise du succès tardif du légendaire homme à tête de chou.

C’est à l’Histoire des musiques créoles que s’attaque l’auteur avec un nouvel essai passionnant. Une fois habituée au langage universitaire, on rentre aisément dans le livre pour y découvrir toute la richesse des musiques étudiées (jambalaya, biguine, calypso, reggae, zouk, steel band, quadrille, polka…).

Le titre quelque peu provocateur (ou du moins interpellant) est expliqué dès les premières pages : Bertrand Dicale revient sur ces appellations de musiques noires et blanches et rappelle, bien qu’elles soient utilisées sans malveillance, que ces expressions son basées sur des critères racistes et biaisés. Il est préférable d’utiliser le terme « créole », car rien n’est jamais entièrement l’un ou l’autre, tout vient d’emprunts et de rencontres, et « créole » signifie cela, que rien n’est « authentiquement » ou « purement » de telle nationalité, précise-t-il (p. 12).

La rencontre dont nous parlons , c’est un homme avec un mauvais violon qui cherche à s’adapter  au rythme que frappent trois autres hommes sur une table et sur des bouteilles ; ce peut être un colporteur qui vend un accordéon à quelqu’un qui n’en a jamais vu et à qui il apprend deux airs à danser […].

Cette introduction est nécessaire, elle permet de faire évoluer la manière dont on envisage la catégorisation des genres musicaux et donne un nouveau sens au vocable « créole », déjà polysémique. Les premières pages de Ni noires ni blanches est aussi l’occasion d’une mise au point sur l’histoire de l’esclavage (très peu étudiée dans les parcours scolaires nous semble-t-il).

Le créole n’est pas le fait de certaines parties du monde, l’auteur affirme, avec les propos d’Edouard Glissant et son concept de « Tout-Monde »,  une créolisation mondiale. Lire Ni noires ni blanches, c’est s’ouvrir au monde, porter un regard différent sur les échanges culturels et sur les musiques dites créoles. On ressort avec en tête une toute nouvelle compréhension des termes « créoles », « créolisation », « créolité »…

Un essai passionnant, complet, très bien édité dans un petit format de poche au graphisme très moderne, épuré et agréable. Une belle édition, une écriture éclairée et une lecture éclairante. On attend le prochain Dicale avec impatience.

Bondeko de Toto Bona Lokua - Soubresaut

Toto Bona Lokua réunit un trio de musiciens qui avait déjà travaillé ensemble sur un premier album en 2004, au début du label défricheur, cosmopolite et odacieux No Format. Le Martiniquais Gérald Toto, le Camerounais Richard Bona et le Congolais Lokua Kanza réitèrent l’aventure pour un deuxième opus intitulé Bondeko, 13 ans plus tard. La réunion de trois cultures différentes et communes, de trois musiciens, de trois voix en harmonies.

Envoûtement chaloupée à l’ouverture avec le douceureux morceau « Ma mama », rythmes plus soutenus sur le titre suivant, puis de nouveau une chanson pour bercer, et ainsi de suite. Tout se croise et s’entrecroise. Les langues (lingua, créole, français) se mêlent et s’entremêlent. Guitare, basse, percussions, claviers : de l’organique, en toute pureté. On ne peut qu’être happé·e par tant de beauté lumineuse, tant de fraîcheur. L’ensemble est d’une fluidité telle que l’on se laisse couler sur la rivière des mélodies et on en redemande.


Site des éditions de la Philharmonie de Paris


Facebook de Toto Bona Lokua


 

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